L'égalité c'est toute l'année : avec la directrice de l'association L'Burn, qui suit les victimes de burn out

Publié le 8 septembre 2024
 
À Bordeaux, l'égalité c'est toute l'année ! Retrouvez au fil des mois, une série de portraits autour de l'égalité entre les femmes et les hommes.

Épisode 7 :  Portrait de l'association L'BURN, et de son réseau Les BURN'nettes, qui apportent soutien et accompagnement aux femmes victimes d'un burn out.
L'équipe de L'Burn, qui accueille les victimes de burn out professionnel ou domestique.
L'équipe de L'Burn, qui accueille les victimes de burn out professionnel ou domestique.
Anne-Sophie Vives est la directrice de l'association L'BURN. Cette structure bordelaise vient en aide aux femmes victimes de burn out d'origine professionnelle et/ou domestique. Une problématique très majoritairement vécue par des femmes et mal reconnue, mais qui revêt pourtant tous les attributs d'un symptôme de santé publique.
 
Le constat lui est tombé dessus en février 2017. Confrontée à un trop plein devenu intolérable lié à un rythme professionnel intense, Anne-Sophie Vives craque et met un nom sur son état : le burn out. Confrontée à l'absence de prise en charge adaptée devant ce mal contemporain mal défini, la notaire de profession cherche de l'aide en ligne, sur les réseaux sociaux. Sous son impulsion, une communauté de victimes grandit rapidement, rassemblée par leurs constats similaires sur les causes de ces délabrements personnels sans issue apparente : elles se nommeront les BURN'ettes. C'est ainsi que naîtra quelques mois plus tard, à Bordeaux, l'association L'BURN.

Le burn out, c'est cet épuisement total que l'on peut traverser en raison de son expérience professionnelle, tel que le veut la définition officielle, mais dont la source peut aussi être domestique comme le défendent de nombreux acteurs associatifs telle L'BURN. "Un écartèlement entre ce que les gens sont, et ce qu'ils doivent faire", décrit un Guide d'aide à la prévention commandé par le gouvernement en 2015. L'accumulation des tâches, des journées remplies à ras bord, et des relations dégradées avec son entourage social peuvent être des facteurs décisifs, voire cumulatifs qui mènent à cet effondrement psychique et physique.    

Cachez ce mal que je ne saurais voir

Anne-Sophie Vives, directrice de L'Burn, est partie d'une expérience personnelle pour lancer la communauté les BURN-ettes.
Anne-Sophie Vives, directrice de L'Burn, est partie d'une expérience personnelle pour lancer la communauté les BURN-ettes.
Depuis 2019, l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) définit ainsi le burn out comme un syndrome résultant d'un stress chronique en lien avec le travail, et non une maladie. En juin 2023, le Conseil d'Etat a néanmoins reconnu que l'inscription du terme sur un certificat d'arrêt maladie par un médecin ne pouvait être condamné. Si les rapports parlementaires se succèdent, la situation reste néanmoins au point mort pour accéder à une véritable reconnaissance.

C'est donc au milieu associatif de se mouvoir pour faire avancer la cause, tel L'BURN. La structure bordelaise s'est donc retroussé les manches pour imaginer un protocole d'accompagnement complet et constituer un plaidoyer. Dès son envol, la structure élargit ce rôle et rassemble professionnels et chercheurs. Et le constat est là : la "maladie" est bien plus largement répandue chez les femmes. "Elles sont deux à trois fois plus victimes de burn out que les hommes selon les données de Santé Publique France. Pour comprendre les causes, nous avons donc rassemblé des experts : chercheurs universitaires, neuropsychologues, médecins, docteurs en Droit… Nous constituons même un terrain d'étude pour différents laboratoires", indique Anne-Sophie Vives.
   

La par-aidance, l'aidé devient aidant

La prise en charge des victimes passe par des permanences et des ateliers. "La première des choses est de s'assurer d'une prise en charge médicale. Il faut ensuite mener une approche complète pour faire taire les ruminations, apprendre le repos, identifier les dysfonctionnements psychocorporels, mais aussi parfois aller sur le terrain juridique pour faire reconnaître sa souffrance."

Une phase d'introspection ouvre le chemin de la guérison. La pair-aidance y tient un rôle essentiel pour redonner du sens à chacune et retoruver une réelle santé mentale. Mis en lumière par des associations comme les Alcooliques anonymes, ce concept permet aux ex-aidées de partager leur expérience pour aider eux-mêmes de nouvelles victimes. A travers l'exemple de leur reconstruction, ces pair-aidantes font émerger le pouvoir d'agir des aidées.

Des tâches primaires du quotidien, qui ont pu devenir insurmontables, peuvent alors être répertoriées et les difficultés à les accomplir dépassées : sortir de chez soi, se remettre en action, identifier les freins du retour à l'emploi, lever les angoisses avant une véritable reprise professionnelle. Les liens vers les hôpitaux, des médecins spécialisés ou des structures d'accompagnement pour la réinsertion professionnelle peuvent aussi être trouvés.
  

Anne-Sophie Vives :
Anne-Sophie Vives : "Les mères célibataires présentent de grands facteurs de risque. Mais l'origine des burn out varie."

Des origines diverses

Si les femmes de 35 à 50 ans représentent la tranche d'âge majoritaire, toutes les catégories sociales sollicitent les BURN'ettes. "Les mères célibataires présentent de grands facteurs de risque. Mais l'origine des burn out varie selon une étude que nous avons menée : 9% sont d'origine parentale, plus de 50% à la fois d'origine parentale et professionnelle, et le reste exclusivement professionnel", constate Anne-Sophie Vives.

Si l'OMS reconnaît uniquement le burn out d'origine professionnelle, la réalité est donc autre. Et les sources familiales présentent des difficultés propres, car on ne peut mettre sur pause son rôle de mère comme on stoppe son activité professionnelle...
  

Après la création d'une communauté via les réseaux sociaux, une véritable association est née.
Après la création d'une communauté via les réseaux sociaux, une véritable association est née.

"Vous nous avez sauvées"

Après plusieurs années passées à Bordeaux, dans la Maison municipale des Associations "La Coloc'", L'Burn a dû déménager vers Talence pour faire face à une fréquentation en nette progression, "plus 50% chaque année. La période Covid a mis en lumière la problématique de la santé mentale", indique la directrice. 2 000 femmes sont actuellement sur la communauté d'entraide et 1 900 ont été accompagnées sur Bordeaux depuis 2019.

Certaines trajectoires individuelles sont étonnantes et prouvent la pertinence du rôle des BURN'ettes. "Nous avons eu des paroles très fortes de nos adhérentes. Certaines nous ont clairement dit : "Vous nous avez sauvées'". Ici, elles se sentent comprises et se reconstruisent grâce à ce nouveau lien social. Même physiquement, nous notons des différences", sourit Anne-Sophie Vives. Désormais, L'Burn a étendu ses activités en virtuel sur des départements limitrophes (Dordogne, Lot-et-Garonne et Landes) et même à Lille pour contribuer à faire face à ce "syndrome" d'ampleur, dont chacun peut un jour être la victime. 

Les permanences se poursuivent à Bordeaux (Point Info Familles, salle Saint-Augustin et à la Maison des usagers).
  

2 000 femmes sont actuellement accompagnées par les BURN'ettes.
2 000 femmes sont actuellement accompagnées par les BURN'ettes.
Informations :
Site web : lesburn-ettes.com
Facebook : la communauté des BURN'ettes (accès limité aux femmes en burn out)