"Voix olympiques" : Eléa Charvet (para canoë-kayak)
À travers la série "Voix olympiques" la Ville part à la rencontre de Bordelais impliqués sportivement ou émotionnellement dans les Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024.
Épisode 6 avec la para-kayakiste Eléa Charvet, passée de la découverte de sa discipline à une qualification paralympique en à peine deux ans.
Episode 6 : Eléa Charvet, une trajectoire fulgurante à contre-courant
À 22 ans, Eléa Charvet a vécu la plus grande émotion de sa jeune carrière de sportive de haut niveau le 7 septembre dernier. Dans le stade nautique de Vaires-sur-Marne (Seine-et-Marne), la Girondine a remporté une finale B, passant à un cheveu de se mêler à la grande explication des meilleures. Rencontre avec ce bourreau de travail, qui a touché au sommet de sa discipline à force de volonté et de travail, quatre ans après un terrible accident.
Née au Pays basque, Eléa Charvet est devenue rapidement girondine suite à un déménagement précoce. Installée toute jeune à Sadirac avec sa famille, elle y baigne dans une ambiance sportive, aidée en cela par un père coach d'escrime, même si la natation et le handball ont ses préférences durant ses premières années. "Le sport était clairement le sujet de discussion le plus pertinent à la maison !"
À 18 ans, un accident de la circulation subi sur son scooter la prive de sa jambe gauche, quelque temps seulement après avoir obtenu un baccalauréat en art appliqué. Un choc qu'Eléa va surmonter grâce à un entourage soudé autour d'elle et une échappatoire, le sport de haut niveau.
"Un vrai défouloir !"
Après une année passée dans un centre de rééducation, l'association "Comme les autres" lui propose de tester une nouvelle discipline qui s'avèrera par un coup de coeur. La pirogue est une embarcation sur laquelle les coups de rame ne se font que d'un côté. "Cela me permet de faire du sport sans prothèse, d'être libre de mes mouvements. Pour moi, qui peux être un peu bourrue, avec un caractère difficile parfois, c'est un vrai défouloir !". Licenciée à l'Émulation nautique de Bordeaux Canoë-Kayak, elle fait ses premières armes à Bordeaux Lac. D'abord alignée sur le fond (5 000 m) et le sprint, Eléa opte finalement pour les courtes distances, plus à même de combler son besoin de laisser exploser son énergie.
Le sprint nécessite de la précision. Chaque répétition de geste doit être réalisée à la perfection afin d'appliquer force, équilibre et vitesse à sa glisse. Une alchimie qui colle à la personnalité d'Eléa, perfectionniste et ambitieuse, pour qui les victoires ne sont qu'une étape avant de viser plus loin.
Un double projet exigeant
Avec les JO de Paris en ligne de mire, la sollicitation de la Team Bordeaux, système de mécénat privé de sportifs lancé par la Ville de Bordeaux en 2022, lui permet d'obtenir plus de visibilité et de cofinancer les coûteuses saisons de compétition (environ 30 000 euros chacune). Ses titres de championne de France en VL3 200M et K2 500m confirment les espoirs mis en elle.
Les JO, "c'était fou !"
D'abord trop juste pour intégrer la sélection paralympique, Eléa accroche le tout dernier wagon lors d'une qualification de rattrapage. Toute heureuse de pouvoir embarquer dans l'aventure de Paris 2024, elle découvre l'ampleur de l'événement : "Personne ne s'attendait à ça. C'était fou, extraordinaire, grandiose. Sur les compétitions ordinaires, on est habitués à voir une centaine de spectateurs sur les berges. Là, il y en avait des milliers les yeux rivés sur vous. Cela nous a tous énormément poussés. Les audiences ont été quasi comparables à celles des Olympiques, c'était inconcevable auparavant. Les gens ont réalisé que nous avions autant de mérites à concourir."
Privée d'une grande finale du 200m VL3 des huit meilleurs pour un petit bout de bateau, Eléa se console en remportant la finale B. "C'est le jeu !" Pas de quoi la décourager, elle qui veut continuer au plus haut niveau. Si ses études, pas encore terminées, la maintiennent en région parisienne, Bordeaux reste dans un coin de sa tête : "C'est toujours un plaisir de revenir. Bordeaux, c'était le début de ma petite vie, l'indépendance, et le soleil aussi ! En tout cas, il y en a plus qu'à Paris !"