"Voix olympiques" : Alain Giresse (Girondins de Bordeaux)

Publié le 28 mai 2024

A travers la série "Voix olympiques" la Ville part à la rencontre de Bordelais impliqués sportivement ou émotionnellement dans les Jeux Olympiques de Paris 2024.

Épisode 3 avec l'ancien footballeur des Girondins de Bordeaux, Alain Giresse, meilleur joueur de l'histoire du club, qui revient sur son lien avec les Jeux et la ville de Bordeaux.
Alain Giresse sur la pelouse du stade Jacques Chaban Delmas, lors du match des légendes le 14 mai 2024.
Alain Giresse sur la pelouse du stade Jacques Chaban Delmas, lors du match des légendes le 14 mai 2024.

Épisode 3 - Alain Giresse, du gamin de Langoiran à la légende vivante de Bordeaux

L'ancien champion de France s'est rappelé au bon souvenir des Bordelais ce mardi 14 mai à l'occasion du match des légendes célébrant les 100 ans du Parc Lescure. L'occasion de rappeler aussi comment se sont noué les liens entre le "petit prince de Lescure", venu de Langoiran à 25 kilomètres, et sa ville de coeur, mais aussi de rappeler son attachement pour les Jeux Olympiques.

Septembre 1964. Alain Giresse a 12 ans. C'est sur une idée de son père que le petit Alain réalise un essai aux Girondins de Bordeaux, sur le domaine de Rocquevielle, à Mérignac. Un essai transformé : il intégrera la catégorie pupilles et restera au club comme joueur durant 22 ans. "Bordeaux, c'était la découverte, la grande ville. Je n'y ai que peu de souvenirs avant les Girondins. À peine avoir vu le Père Noël dans la rue Sainte-Catherine…"

Né à Langoiran en 1952, le futur "Gigi" vient au monde "à la maison". Sa mère est factrice, son père artisan-charpentier. L'atelier jouxte la maison familiale. C'est au milieu des machines à bois que roule son premier ballon. Pas un hasard. Le père, Jacques Giresse, est footballeur amateur au club de la Bastidienne, à Bordeaux, niveau régional. "Forcément, le ballon, les crampons, ça m'a tout de suite attiré. J'ai commencé à jouer dans l'atelier." Très impliqué dans son sport, le paternel crée sur la rive droite bordelaise une équipe de jeunes minimes (13-14 ans), 4 ans plus âgés qu'Alain. Déjà très doué, le gamin tient la comparaison lors de rencontres amicales avec ses aînés, tout en rongeant son frein de compétiteur, faute d'équipe de jeunes à Langoiran.
 

Alain Giresse au stade Jacques Chaban-Delmas le 7 mai 2024. Un stade qu'il a découvert en 1963.
Alain Giresse au stade Jacques Chaban-Delmas le 7 mai 2024. Un stade qu'il a découvert en 1963.

Lescure, tout un mythe

La détection de Rocquevielle est donc un succès. Alain va désormais vivre entre Langoiran et Bordeaux, équilibrant son quotidien entre école primaire et compétition. Chaque week-end, il doit se rendre en bus Citram dans le centre-ville, au terminus de la rue Lafaurie de Monbadon, à deux pas du siège du club à l'époque, au 55 cours Clémenceau. De là, il rejoint les différentes barrières des boulevards, où se donne rendez-vous l'équipe. Au-dessus du lot, il grimpe alors les échelons quatre à quatre en étant régulièrement surclassé. La catégorie juniors (17-18 ans) sera celle de la révélation. En octobre 1970, âgée d'à peine 18 ans, Alain Giresse est appelé avec la "grande équipe", moribonde et engluée en fin de classement dans l'élite. La bonne fenêtre pour voir éclore un jeune du centre de formation et devenir l'idole d'un stade…

"Lescure, je l'ai d'abord connu en passant sur les boulevards et en admirant cette arche… Ma première au stade, comme spectateur, c'était en mai 1963, un match entre les Girondins et les Brésiliens de Palmeiras, qui comptaient dans leurs rangs des champions du monde de 1962 ! C'était un émerveillement pour moi qui ne connaissait que les stades de campagne. Je regardais partout... Les joueurs ne s'échauffaient pas sur la pelouse mais surgissaient du tunnel qui sortait de la pelouse devant le virage sud directement avant le début du match."
 

Aux côtés des anciens Bordelais Cédric Carrasso, Franck Jurietti et Didier Sénac (de gauche à droite), avant le match des légendes.
Aux côtés des anciens Bordelais Cédric Carrasso, Franck Jurietti et Didier Sénac (de gauche à droite), avant le match des légendes.

Les JO, le souvenir intense de Mexico

Athlète endurant d'un mètre 63 à la technique soignée, Alain Giresse a vite apprécié les Jeux Olympiques et ses exploits, notamment dans l'athlétisme. D'abord à Tokyo en 1964, mais surtout à Mexico en 1968 : le sauteur en longueur américain Bob Beamon et son record du monde à 8,90m, ou encore Richard Fosbury et sa révolution du saut en hauteur "en rouleau dorsal". Sans oublier la tricolore Colette Besson, championne olympique du 400m la même année et entraînée à Bordeaux. "C'était magique. L'altitude a permis de bousculer de nombreux records."
 

 


Si l'ascension du jeune Girondin est constante, le club vit une décennie 70 en berne. Ses débuts en équipe de France sont ronronnants. Et il faut attendre la nouvelle ère impulsée par le président du club Claude Bez à son arrivée en 1978 pour que sa carrière prenne un nouveau virage. Les années 1980 seront celles des titres (championnats de France 84 et 85, Coupe de France 86, championnat d'Europe des Nations 84) et des drames magnifiques comme cette demi-finale du Mondial 82 à Séville perdue aux tirs au but contre la RFA.
 

Avec l'ancien joueur Jean-Marc Ferreri au stade Chaban Delmas.
Avec l'ancien joueur Jean-Marc Ferreri au stade Chaban Delmas.

Le match des légendes, un parfum d'antan

Le 14 mai dernier, le match des légendes opposant les gloires des Girondins aux Variétés Club de France a permis de lancer les festivités autour des 100 ans du parc Lescure. Un moment unique de communion avec le public qui a fait ressurgir des émotions lointaines. "Je remercie la Mairie d'avoir lancé cet anniversaire, surtout que les billets ont été vendus en deux jours ! J'ai eu l'impression de revenir dans mon jardin, comme si les années n'avaient pas existé. Tout était normal, comme d'habitude. Hormis que je jouais avec ces coéquipiers (Zidane, Lizarazu, Dugarry, Gourcuff…) pour la première fois. Sauf, Marius Trésor durant deux minutes !"

Et quand on l'interroge sur les souvenirs de Lescure qui revêtent le plus bel éclat, la réponse est toute trouvée. "Les plus beaux souvenirs restent les premiers. Oui, il y a les grands matchs, comme celui de la Juventus de Turin en 1985, le retour de Paris avec la Coupe de France en 1986, quand nous avons été reçus sur le balcon de la Mairie devant la foule, après avoir traversé en triomphe la ville depuis la gare. Récemment, une personne m'a même montré un bout de la veste que j'ai jetée au public ce jour-là… Mais quand on est gosse, être ramasseurs de balle, jouer en lever de rideau, connaître son premier match professionnel à domicile, c'est imbattable. Dans ce stade, j'avais l'impression de connaître tout le monde : mes amis du village, du collège, du service militaire. Toute ma vie est ici."
 

Alain Giresse, une nouvelle fois capitaine de son équipe, lors du match des légendes le 14 mai 2024.
Alain Giresse, une nouvelle fois capitaine de son équipe, lors du match des légendes le 14 mai 2024.